Apporter leur pierre à l’édifice et contribuer à la mise en lumière de la guerre à l’Est de la République démocratique du Congo : telle est la mission que se sont données Line, Naomi et Elie en créant l’association Kimzo, fondée l’an dernier dans le cadre d’un projet scolaire. Une initiative qui prend aujourd’hui une nouvelle ampleur avec l’organisation d’un concert caritatif, prévu le 12 juillet à la Flèche d’Or.
Alors que la situation à l’Est de la RDC ne cesse de se dégrader, une partie de la jeunesse de la diaspora s’engage avec force, bien loin des clichés qui la dépeignent comme dépolitisée. Depuis 2023, on assiste à Paris et ailleurs à une multiplication des mobilisations : manifestations, campagnes de sensibilisation, créations de médias et d’associations, événements culturels en soutien au peuple congolais.
Le 25 juin dernier, nous avons rencontré les trois fondatrices de Kimzo pour un entretien exclusif, dans le cadre de ces mois de juin et de juillet si symbolique pour l’histoire de la RDC.
Naissance d’un projet entre urgence et conviction
Mana : Est-ce que vous pouvez vous présenter ?
Naomi :
Je m’appelle Naomi, j’ai 27 ans. Je suis la secrétaire de l’association Kimzo et étudiante en master de management de la musique. Mon objectif principal, c’est de créer des événements artistiques pour valoriser les talents émergents. Cette année, on a décidé de lancer un projet qui permette à la fois de mettre en lumière des artistes et de défendre une cause qui nous tient particulièrement à cœur. C’est dans cette optique qu’on a créé l’association Kimzo et lancé le concert caritatif Kimzo Live.
Elie :
Moi, c’est Elie, j’ai 23 ans – bientôt 24. Je suis aussi en dernière année de master en management de la musique. Actuellement, je suis en stage en communication et production chez Session 32, une structure qui organise des événements à Paris. Mon projet professionnel, ce serait de devenir bookeuse, plutôt dans le domaine du live, et si possible à l’international.
Line :
Moi c’est Line, j’ai 23 ans. Je suis la trésorière de l’association Kimzo. Comme Naomi et Elie, je suis en master de management de la musique, et je travaille en parallèle comme cheffe de projet dans un label. Mon objectif professionnel, c’est de faire du management d’artistes. Et en ce qui concerne Kimzo, c’est un projet qui me touche profondément, au-delà de l’aspect humain, parce que je suis congolaise.
Mana : C’est quoi la genèse du projet ? Est-ce que c’est un projet de l’école ? Où est-ce que vous voulez l’emmener ? Et pourquoi organiser un concert le 12 juillet ?
Line :
À la base, c’est un projet qu’on a commencé l’année dernière dans le cadre de notre formation. On nous avait demandé de réaliser un projet en conditions réelles, et au début on était un peu perdues. J’ai proposé l’idée d’un concert caritatif, même si je trouvais ça ambitieux, surtout à gérer seule. Finalement, on a décidé de s’associer toutes les trois. Comme on est dans le milieu de la musique et qu’on a des cours qui nous permettent de concrétiser nos idées, on s’est dit que ça valait le coup.
Il y a aussi une dimension personnelle : Elie et moi sommes congolaises, et Naomi est très proche de la communauté congolaise. C’est ce qui nous a rapprochées autour de cette cause.
Elie :
Effectivement, je me souviens que tu voulais faire un concert. De mon côté, à la base, c’était plutôt un festival que j’avais en tête. Et je me rappelle très bien : on s’est regardées et on s’est dit, autant tout combiner. Un concert caritatif, à trois, ça peut vraiment être une belle aventure. C’est comme ça que ça a commencé.
Et pour le choix de la date, le 12 juillet… Franchement, il n’y a pas vraiment de raison particulière.
Naomi :
C’est une date qu’on a fixée très tôt, en discutant avec la salle de concert. On savait qu’on voulait faire ça en juillet, alors on a choisi de placer l’événement au milieu du mois, et le 12 juillet s’est imposé naturellement.
Elie :
Oui, en plus on s’est dit que ça tombait bien : comme le 14 juillet est un jour férié, les gens allaient peut-être se dire que le 12, c’est une bonne occasion de sortir, surtout pour un événement caritatif. C’était cohérent.
Créer un concert caritatif : entre passion et galères
Mana : C’est comment, d’organiser un concert ?
Line :
C’est vraiment difficile, surtout quand il y a autant d’humain à gérer. Il y a des moments où tout avance bien, on est super contentes, certaines démarches se concrétisent… puis d’un coup, plus de réponse, on doit relancer untel, puis un autre… Il y a toujours un truc à rattraper, et franchement c’est épuisant.
Elie :
Oui, il y a aussi des abandons de dernière minute, des artistes qui se désistent sans prévenir, donc on doit constamment rebondir, relancer d’autres personnes, chercher des remplaçants… Franchement, c’est hyper dur.
Naomi :
Cela dit, on est quand même très fières de porter un projet de cette envergure, surtout parce qu’il défend une cause qui nous tient profondément à cœur. Ce qui se passe au Congo, c’est grave, et on ne peut pas détourner les yeux.
Mais organiser un concert, c’est un vrai défi : il faut des artistes qui soient en accord avec notre message, souvent issus de la diaspora congolaise. Sauf qu’ils ne sont pas toujours disponibles…
Du coup, on essaie de trouver des profils qui nous plaisent, mais aussi qui parlent au public qu’on veut toucher. C’est un vrai casse-tête.
Parfois, on passe par les managers, mais ils ne répondent pas. Alors on écrit directement aux artistes sur Instagram… sans certitude qu’ils voient nos messages. Mais on tente, on donne tout. C’est un vrai parcours du combattant.
Choisir une association fiable pour reverser les dons
Mana : Ça a été plus compliqué de trouver les artistes ou de monter l’association ?
Line :
Les artistes, clairement.
Tout ce qui concerne l’association, les démarches administratives, on les a faites assez rapidement. On l’a créée l’été dernier, en deux mois à peine, donc ça a été plutôt fluide.
Ce qui a été vraiment compliqué, c’est l’organisation autour du concert : il n’y a pas que les artistes, il y a aussi la salle, la logistique…
Parfois, on voudrait que ça avance vite, qu’on puisse lancer les choses tout de suite, mais il y a plein d’étapes à valider avant : des vérifications, des confirmations, des délais… C’est fatigant.
Elie :
Et puis on a aussi fait des demandes de subventions qu’on n’a malheureusement pas obtenues.
Les retours qu’on a eus, c’était soit parce que notre projet était jugé “trop politique”, comme on nous l’a clairement dit, soit parce qu’il y avait un risque que la cagnotte ou les financements soient bloqués à cause de la cause qu’on défend.
Donc au final, on n’a reçu aucune aide financière, ce qui nous a poussées à chercher des salles prêtes à nous soutenir, ou à nous proposer une mise à disposition gratuite – vu que c’est un événement caritatif.
Mais là aussi, ça a été très compliqué : certaines salles nous demandaient des montants complètement déraisonnables.
Mana : C’était quoi le montant le plus élevé qu’on vous ait demandé ?
Naomi :
Je crois que c’était au 360, vers Château-Rouge – ou Château-d’Eau, je ne sais plus.
Rien que pour “l’énergie”, on devait payer 1000 euros.
Mana : L’énergie ? C’est quoi exactement ?
(rires)
Naomi :
C’est tout ce qui concerne l’électricité, les branchements, etc.
Il y avait aussi 500 euros pour la communication et la captation.
Et environ 1000 euros pour la location de la salle elle-même, selon qu’on la veuille en configuration assise ou debout.
En tout, ça dépassait pas 3000 euros… mais pour nous, étudiantes, c’est énorme.
Et même pour un événement caritatif, c’est un montant très élevé.
Elie :
Surtout que le 360, c’est le QG de beaucoup de projets culturels.
Line :
Oui, on s’est dit que ce lieu était symbolique, historique, idéal pour notre message. Ça aurait été parfait.
Mana : Et finalement, vous faites le concert où ?
Les filles :
À La Flèche d’Or.
Mana : Un lieu hyper symbolique justement, en lien avec les combats associatifs.
Les filles :
Oui, exactement.
Mana : Est-ce que vos études vous ont aidées pour tout ce qui est démarches de salle, logistique, etc. ?
Line :
Moi je trouve que ça va, même si on n’a pas toutes eu les mêmes expériences. Certains profs auraient pu aller plus loin dans leurs explications, mais il fallait vraiment aller les voir après les cours pour avoir des infos concrètes. En soi, les cours posent un cadre, mais ça ne va pas toujours dans le détail. Heureusement, grâce à mon alternance, j’ai pu poser des questions à mon entourage pro, et ils m’ont donné quelques conseils, des tips utiles. Il faut oser demander, c’est aussi ça la démarche.
Elie :
Je suis d’accord, globalement ça m’a aidée. Surtout que dans mon ancienne alternance, j’avais déjà eu à faire des demandes de salles, de partenariats, à gérer des budgets… Du coup, j’ai pu transmettre ces expériences aux filles, et au fur et à mesure, on a trouvé notre rythme.
Naomi :
Moi, j’ai plutôt eu un ressenti inverse. J’ai trouvé qu’on manquait d’accompagnement de la part de nos profs. Ce sont pourtant des professionnels de la musique, mais personne ne nous a vraiment dit : “Voilà une liste de contacts utiles pour organiser vos événements, vous pouvez les solliciter.”
On s’est débrouillées toutes seules, que ce soit pour le financement ou pour trouver une salle.
Par exemple, pour La Flèche d’Or, on a été mises en contact avec la personne qui gère la salle. Et quand on en a parlé à notre prof, il nous a dit : “Ah mais vous la connaissez ? Trop bien !”
Mais pourquoi il ne nous l’a pas donnée dès le départ, si c’est un contact qu’il avait ?
Mana : Vous avez trouvé facilement vos partenariats ?
Naomi :
Pas vraiment. On a eu quelques difficultés, notamment pour trouver une association partenaire qui puisse reverser directement l’argent récolté en République démocratique du Congo.
C’était essentiel pour nous : on voulait que les dons aillent directement sur le terrain, sans passer par dix structures intermédiaires.
Mana : Quels étaient vos critères pour choisir cette association ?
Comment vous l’avez trouvée ?
Et comment vous avez vérifié que c’était une structure fiable et que l’argent allait bien arriver à destination ?
Naomi :
Déjà, dès le départ, on voulait collaborer avec une association basée directement au Congo, idéalement dans la région du Kivu. On voulait s’assurer que l’argent récolté irait vraiment sur le terrain, et qu’on puisse suivre son utilisation.
Mais on a rencontré des complications, notamment pour les dossiers de subvention : si l’association partenaire n’est pas enregistrée en France, les fonds peuvent être bloqués. Encore une fois, on nous a parlé d’un “risque politique”. On ne comprenait pas trop, mais on s’est dit qu’on allait devoir trouver une association française en lien direct avec le Congo, pour contourner ces obstacles tout en garantissant l’efficacité sur place.
On voulait éviter à tout prix les associations qui disent : “On récolte des dons pour le Congo”, mais en réalité gardent l’argent ici, ou le transfèrent de manière opaque, sans réel impact. Ce n’est pas ce qu’on voulait du tout.
On veut être transparente, et ne pas perdre la confiance des gens qui nous soutiennent. Ceux qui donnent doivent savoir où va leur argent.
Au début, on a rencontré une personne lors d’un événement où on tenait un stand. Cette personne nous a parlé d’une association basée au Congo, Congo for Peace (je crois). On les a appelés, mais la conversation ne nous a pas mises en confiance. Quand on leur a demandé ce qu’ils feraient concrètement avec l’argent, ils nous ont répondu : “Et vous, vous voulez qu’on en fasse quoi ?”.
Ce n’est pas ce qu’on attendait. On voulait une réponse claire : “Ça ira pour les écoles, pour les soins, pour les femmes…”, quelque chose de précis. Donc on a décidé de chercher ailleurs.
C’est comme ça qu’on a découvert France Kivu, une association basée en France et en partenariat avec le Dr Denis Mukwege. Elle aide les femmes victimes de guerre au Congo.
On les a contactés, et ils nous ont expliqué leur fonctionnement : ils organisent régulièrement des événements partenaires, reçoivent des dons, convertissent l’argent en dollars, puis le transfèrent directement à l’hôpital de Panzi, au Sud-Kivu.
Cet argent sert à acheter des draps, du matériel chirurgical, à soutenir les écoles, à former les jeunes, notamment les futurs médecins…
On a été rassurées. C’était clair, précis, structuré. On s’est dit : ok, c’est l’association qu’il nous faut.
Elie :
On est restées plus d’une heure au téléphone avec la dame. Elle nous a tout expliqué, de A à Z.
Franchement, c’était carré.
Jeunesse congolaise : en finir avec les clichés
Mana : En ce moment, depuis un ou deux mois, je vois de plus en plus d’événements pour le Congo, organisés par des associations de toutes tailles. Et franchement, parfois je me demande : Est-ce que c’est vraiment sérieux ?
C’est une cause qui, malheureusement, peut être instrumentalisée. Je ne sais pas ce que vous en pensez…
Line :
On se l’est dit aussi. Il faut savoir qu’on travaille sur ce projet depuis l’année dernière, on a monté l’association bien avant que ce soit un sujet “à la mode”.
Et c’est vrai que l’événement Solidarité Congo nous a un peu freinées. À ce moment-là, on cherchait encore nos artistes, et on a senti que ça compliquait les choses. Peut-être que certaines personnes ont pensé qu’on surfait sur la vague.
Elie :
Je comprends ce que tu veux dire. On a un peu l’impression que, pour certaines personnes, la cause du Congo est devenue une sorte de tendance, de “hype”.
Genre : “Toi aussi tu fais un truc pour le Congo ? Ah ok, moi aussi je vais en faire un.”
Mais ce n’est pas notre démarche.
Pour nous, c’est une cause profonde, qui nous touche personnellement. On veut apporter notre pierre, pas faire comme tout le monde.
Et c’est important que la nouvelle génération s’implique. Il n’y a pas que nos parents qui doivent porter ce combat.
Nous, les enfants de la diaspora, on veut agir concrètement pour le Congo, à notre manière.
Mana : Là, tu abordes un point très important : la jeune génération.
On entend souvent qu’on ne s’implique pas assez, qu’on est juste là pour faire la fête, aller à des concerts, aller voir Fally Ipupa… et qu’on ne s’intéresse pas vraiment à la situation.
Du coup, je vous pose la question : qu’est-ce que vous pensez de ces stéréotypes ?
Est-ce que ce sont des stéréotypes justement, ou est-ce qu’il y a un fond de vérité ?
Elie :
En fait, je suis mitigée. D’un côté, je comprends les stéréotypes : c’est vrai que la communauté congolaise, on aime la folie, on est souvent dans la vibe, dans la fête, sur TikTok, dans la danse. Du coup, ça donne une image de gens pas toujours sérieux.
Mais ce que les gens ne voient pas, c’est que derrière, on agit aussi. C’est comme si on avait deux visages : on aime s’amuser, mais on est aussi engagés. C’est juste qu’on ne le montre pas forcément de la manière attendue.
Line :
Moi, je trouve que ça fait mal d’entendre ces critiques, parce que le peuple congolais est engagé depuis longtemps. Même avant notre naissance, il y a eu des marches, des mobilisations, des assos créées…
Et aujourd’hui encore, on entend certains dire : “On ne savait pas ce qui se passait au Congo.” Franchement, si vous voulez voir, vous verrez. Les images d’enfants, de femmes, de villages détruits, ça circule depuis longtemps.
Mais j’ai l’impression que notre souffrance n’est pas considérée comme importante, que les Congolais ne sont pas vus comme un peuple à défendre. Pourtant, là, on voit plus d’événements, plus de mobilisation, et ça fait plaisir.
Après, ce qui me dérange, c’est cette impression que certaines personnes ne s’engagent que par effet de mode. Il y a eu un vrai pic sur les réseaux, tout le monde en parlait, puis plus rien.
Donc, oui, je suis mitigée aussi.
Mana :
Mais en fait, je pense que c’est parce qu’on croit à tort qu’un engagement militant, c’est quelque chose de permanent, 24h/24, 365 jours par an.
Or, le militantisme, ça s’apprend, ça se vit, ça s’équilibre. Même les plus grands militants rient, vivent, ont une famille.
Patrice Lumumba avait une femme, des enfants, une vie privée en plus de son engagement politique.
Donc dire que les Congolais sont “dans le divertissement”, pour moi, c’est faux. C’est une image qu’on colle volontairement pour invisibiliser les vraies luttes.
Et puis, regardez le Dr Mukwege. Il tourne dans le monde entier, il a eu le Prix Nobel de la Paix, le prix Sakharov…
Alors quand on dit “personne ne parle du génocide au Congo”, je pense que c’est volontairement faux. On en parle. C’est juste que certains choisissent de ne pas écouter.
Et pour moi, notre génération est beaucoup plus engagée qu’avant. Il y a 10 ans, je ne voyais pas autant de jeunes marcher pour le Congo, créer des assos, organiser des événements comme vous.
Donc oui, tout le monde n’est pas engagé, mais il y a une dynamique très forte. Et je pense qu’il faut arrêter de répéter “Personne ne parle du Congo.” C’est devenu une phrase pour gratter des likes, et je n’aime pas ça.
Naomi :
Je suis d’accord. Ce que je ressens, c’est que dans notre génération, il y a une tendance à vouloir montrer pour prouver. Genre : “Regardez-moi, je milite !”
Mais l’engagement peut aussi se vivre en silence.
On n’a pas à prouver constamment qu’on agit.
Et pour la diaspora congolaise, même si je ne suis pas d’origine congolaise, j’ai grandi entourée de Congolais. Et je sais à quel point c’est un peuple riche, aimant, chaleureux, qui a besoin de soutien.
Si j’ai les moyens d’aider, je le fais. Point.
Moi, je n’ai pas vécu le discours des parents qui reprochent aux jeunes de ne pas s’engager, car j’ai grandi avec ma mère seule.
Mais les parents de mes amis congolais m’ont toujours considérée comme leur fille. Ils m’ont transmis cette affection et cette conscience.
Une prise de conscience générationnelle
Mana : Et du coup, toi qui n’es pas congolaise, comment tu perçois cette communauté ?
Naomi :
Franchement ? Comme une communauté ultra chaleureuse. Quand tu es avec des Congolais, tu te sens chez toi.
Ils t’accueillent, ils te font rire, ils te transmettent leur culture, leur énergie… J’adore ce peuple.
Mana : Et comment tu as appris qu’il y avait un génocide au Congo ?
Naomi :
Par ma meilleure amie, en fait.
On se connaît depuis la sixième. Quand j’allais chez elle, ses parents en parlaient souvent. Sa mère disait : “Regarde ce qui se passe là-bas, c’est la guerre.”
Et chaque 30 juin, jour de l’indépendance, elle faisait toujours un post ou une story pour rappeler ce qui se passe au Congo.
Donc non, ce n’est pas récent du tout.
Et je pense même que ce combat a été étouffé volontairement. On n’a pas voulu qu’on en parle trop.
Mana : Et vous, Line et Elie, en tant qu’enfants de la diaspora congolaise, à quel moment vous avez pris conscience de ce qui se passe dans le pays d’origine de vos parents ?
Line :
Très jeune. Je devais avoir 9 ou 10 ans.
Ma mère me disait souvent : “J’ai quitté le Congo, mais ce n’est pas facile là-bas. Sois fière de vivre ici.”
Elle ne rentrait pas trop dans les détails, mais tu ressens la douleur dans ses mots.
Et plus on grandit, plus on comprend. On voit nos oncles débattre pendant des heures. Ils commencent en parlant de foot, et ça finit toujours en discussion sur le Congo.
Et là, tu réalises que c’est profond, que ça dure depuis longtemps.
Eux-mêmes ont reçu ces discours de leurs parents, et maintenant ils nous disent : “C’est vous qui allez changer les choses.”
Et j’espère qu’on ne répétera pas ça à nos enfants.
Elie :
Moi aussi, ça remonte à loin.
Mes parents nous ont souvent raconté comment ils sont arrivés ici. Et quand je suis allée à Kinshasa pour la première fois en 2009, j’ai vu la différence.
Même si j’étais à la capitale, mes oncles me disaient : “Ici, tu es bien, mais ailleurs, c’est très compliqué.”
Et en 2018, j’y suis retournée. Et là, je me suis dit : “Ok, il faut que je m’informe, que je connaisse mon histoire.”
C’est à partir de là que j’ai commencé à vraiment m’engager.
Mana : Et si demain, vous deviez expliquer ce qui se passe au Congo en quelques mots simples, vous diriez quoi ?
Line :
Je dirais qu’il y a un génocide en cours, lié à l’exploitation de ressources naturelles, comme le coltan, qui sert dans tous nos appareils électroniques.
Naomi :
Moi, je dirais qu’un État extérieur ou plusieurs exploitent le pays sous couvert de guerre, pour piller le coltan, tout en masquant le génocide. On fait passer ça pour un conflit local, alors que c’est un plan économique et politique global.
La programmation du concert Kimzo Live

Mana : Et du coup, qu’est-ce qui nous attend le 12 juillet ? Quelle est la line-up ?
Naomi :
On commence avec un DJ set de “Le Z du A”, une DJ émergente. Ensuite, Kito, un artiste congolais afro R’n’B.
Puis Linda Helende, une artiste R’n’B, ensuite Bénédicte, une chanteuse soul R’n’B avec une voix incroyable.
Et enfin, Réa, un artiste belge, clôturera la soirée.
Il y aura aussi des stands partenaires, notamment “Plus Jamais Seul”, une marque streetwear engagée pour le Congo.
Et on terminera avec un dernier DJ set.
Mana : C’est de quelle heure à quelle heure ?
Naomi :
De 18h30 à minuit.
Mana : Et la cagnotte ? Jusqu’à quand peut-on contribuer ? Comment ça marche ?
Line :
Elle est sur HelloAsso. On ne s’est pas fixé de date limite.
Naomi :
Et la billetterie fonctionne comme un don. Tout l’argent récolté, que ce soit à l’entrée ou pendant l’événement, sera reversé à l’association France Kivu.
Elie :
La salle prend une petite partie car ce n’est pas une mise à disposition gratuite, mais le reste va directement à la cagnotte.
Et après ? Vers un mouvement pérenne
Mana : Et après ? Quelle suite ?
Elie :
Si ce premier concert marche bien, on aimerait faire une deuxième édition l’été prochain.
Mais au-delà de ça, on veut continuer à s’impliquer, faire des partenariats avec d’autres événements, assos, marches, conférences…
Naomi :
C’est notre première édition, donc il y a des erreurs. On apprend en faisant.
L’idée, c’est de s’améliorer, avoir plus de partenaires, plus d’artistes, et porter plus de combats.
Mana : Un dernier mot ?
Naomi :
Venez au concert, ce 12 juillet.
Avec Kimzo Live, Line, Naomi et Elie prouvent qu’il est possible de transformer un projet étudiant en un véritable acte militant. Leur engagement incarne une jeunesse diasporique consciente, mobilisée et prête à prendre le relais pour faire entendre la voix du Congo.
En mêlant musique, solidarité et mémoire, elles rappellent que chaque initiative compte — et que la lutte pour la justice et la paix en RDC passe aussi par l’art, la parole et l’union.
Lien de la billetterie : https://shotgun.live/fr/events/kimzo-live