Le 30 juin 1960, la République Démocratique du Congo devenait officiellement indépendante après plusieurs décennies de domination coloniale belge. Le pays retrouvait enfin sa souveraineté, un moment historique et plein d’espoir pour toute une nation, sous la présidence de Kasa-Vubu. Mais soixante-cinquante plus tard, le pays continue de faire face à des difficultés : instabilité politique, corruption, climat de violence, et exploitation de ses ressources naturelles. Quel est le bilan aujourd’hui ? Que reste-t-il de ce que Lumumba espérait pour le Congo ?
Un Congo libre mais déjà fragilisé

L’indépendance de la Congo, célébrée le 30 juin 1960, représente un tournant majeur dans l’histoire du pays. Pour beaucoup, c’est le début d’un nouveau chapitre, celui d’un État libre et souverain. À la tête du Mouvement National Congolais, parti politique nationaliste, Patrice Lumumba, nommé Premier ministre, incarne cet espoir de rupture avec le passé colonial, aux côtés du président Joseph Kasa-Vubu. Son discours prononcé le jour de l’indépendance à Léopoldville (Kinshasa aujourd’hui) reste marquant, il dénonce les violences de la colonisation belge et affirme la volonté du peuple congolais de reprendre le contrôle de son avenir : “ La République du Congo a été proclamée et notre cher pays est maintenant entre les mains de ses propres enfants”.
Mais très vite, le pays bascule dans l’instabilité. L’indépendance a été accordée dans la précipitation, allant à l’encontre avec le plan de 30 ans pour l’émancipation de l’Afrique belge” proposé par l’universitaire belge Jef Van Bilsen, un projet progressif que l’ABAKO, l’alliance des bakongos dirigée par Kasa-vubu, avait rejeté, souhaitant une indépendance immédiate. L’État est mal préparé, l’administration faible, et la dette déjà importante. Quelques jours seulement après l’indépendance, l’armée toujours dirigée par des officiers belges se révolte. La Force publique se met en grève, des violences éclatent. Le chaos s’installe.
Les semaines suivantes sont marquées par des divisions politiques. Lumumba et Kasa-Vubu entrent en conflit sur la gestion du pouvoir. Pendant ce temps, Moïse Tshombe, leader de la province du Katanga, déclare son indépendance avec le soutien de la Belgique. Joseph Mobutu, chef de l’armée, profite de cette situation pour prendre le pouvoir par un coup d’État. En janvier 1961, l’assassinat de Lumumba fais tout basculer. L’espoir d’un véritable changement s’effondre. La souveraineté congolaise, pourtant toute récente, se retrouve déjà profondément fragilisée.
Les choix politiques qui pèsent sur la RDC aujourd’hui

Depuis l’indépendance, la RDC a été marquée par une succession de dirigeants dont la gouvernance a souvent aggravé la situation du pays. Mobutu Sese Seko, au pouvoir pendant plus de 30 ans, a imposé une dictature autoritaire. Sous son régime, la corruption s’est généralisée et les institutions se sont affaiblies. Le pays, riche en ressources, s’est appauvri.
En 1997, Laurent-Désiré Kabila prend le pouvoir avec le soutien du Rwanda et de l’Ouganda, après que leurs troupes ont envahi l’Est du pays. Présenté comme un homme du changement, Kabila finit par s’éloigner de ses alliés et s'oppose à l’intervention rwandaise et ougandaise. Ce revirement provoque un nouveau conflit : la "deuxième guerre du Congo" en 1998, un des conflits les plus meurtriers de l’histoire humaine, qui implique neuf pays africains et qui a fait environ 5,4 millions de morts.
Son fils, Joseph Kabila, lui succède en 2001 après son assassinat. S’il promet l’instauration d’une démocratie, sous sa présidence les élections sont retardées, la transparence absente, ce qui a renforcé la méfiance des congolais envers le pouvoir.
Les faiblesses internes, notamment la mauvaise gouvernance, les promesses trahies ou encore la corruption ont permis à des puissances voisines de tirer profit de la situation. Le pays est riche de ressources, mais il a surtout été appauvri par une série de choix politiques et par une dépendance croissante à l’égard de ses voisins.
Le conflit en RDC peut-il enfin prendre fin ?
Plus de trente ans après le début des violences dans l’Est de la RDC, la situation reste critique. Des groupes armés, comme le M23, continuent d’étendre leur contrôle dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Ce génocide se poursuit dans un silence presque général. Les rebelles soutenus par le Rwanda, bien que Kigali nie toute implication, continuent de menacer plusieurs villes importantes à l’est de la RDC. Après avoir longtemps ciblé Goma, provoquant ainsi des déplacements massifs de la population, le M23 progressent vers Bukavu, et certains redoutent une avancée vers Kinshasa.
Le Rwanda profite de l’instabilité pour exploiter illégalement les ressources minières congolaises (le coltan, le colbat, l’or, le diamant...). La République démocratique du Congo peine à assurer sa souveraineté. Dans cette crise régionale complexe, plusieurs pays comme l’Angola, l’Ouganda et les États-Unis jouent aussi un rôle.
Le bilan est lourd : Plus de 6 millions de morts, 4 millions de déplacés, dans l’indifférence de la communauté internationale. Les femmes et les enfants sont les principales victimes. Les violences sexuelles sont utilisées comme arme de guerre. La famine et les maladies aggravent davantage la souffrance de la population congolaise.
Le 27 juin 2025, un accord de paix a été signé à Washington entre la RDC et le Rwanda. Il prévoit notamment l’éradication des FDLR, la protection des civils, le retour des déplacés et des réfugiés. Mais le M23, pourtant au cœur du conflit, n’a pas été associé aux négociations. Ce flou laisse planer des doutes sur la portée réelle de l’accord, alors que la population civile continue de payer le prix du conflit.